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Maurice compte un taux élevé de grossesses précoces

Les chiffres concernant les grossesses précoces à Maurice sont énormes. C’est ce qu’indique Dr Chandra Shekar Ramdaursingh, gynécologue-obstétricien dans le privé. Il était parmi les invités de l’émission, Allô docteur, de Radio Plus.

De janvier à juin de 2019, 147 cas de grossesses précoces ont été référés à la Mauritius Family Planning and Welfare Association (MFPWA). Sur les 11 000 à 12 000 naissances annuelles de Maurice, 10% concernent les filles de moins de 19 ans, a fait ressortir Shirley Philippe, Program Officer de l’organisme. Elle a fait ressortir : « Il y a vraiment un problème de fertilité parmi les adolescentes. Nous devons nous adapter à la situation et apporter le service approprié et nécessaire aux jeunes. Il faut avoir un service intégré et de counselling avant de proposer une méthode de contraception. C’est une question de choix et de droit de la personne même s’il s’agit d’un mineur. »

Pour Agniezka Kieniewicz-Duvergé, directrice de l’Action familiale (AF), les valeurs sur lesquels les adolescents peuvent réussir doivent d’abord être mises en avant. « La sexualité ne peut être séparée des valeurs humaines et avant de parler de contraception, le jeune doit comprendre le fonctionnement de son corps, ce que veut dire être fertile et comment le discerner avant chaque acte. »

Pour Monique Dinan, fondatrice du Mouvement d’Aide à la Maternité (MAM), qui accueille et encadre les mères-célibataires il y a un grand travail à faire avec les jeunes à partir de 12-13 ans. « Cela concerne autant les jeunes filles que les garçons car c’est le garçon qui va mettre la fille enceinte. Ils ne connaissent pas leurs responsabilités, ils ne font qu’obéir à leurs pulsions sans prendre conscience des problèmes qu’ils peuvent avoir avec la police, la famille etc. »

Le Dr Chandra Shekar Ramdaursingh, gynécologue-obstétricien
Le Dr Chandra Shekar Ramdaursingh, gynécologue-obstétricien

Selon le Dr Ramdaursingh, une hausse de 3% de grossesses précoces a été observée depuis ces dix dernières années à Maurice. « Ce chiffre est énorme et c’est peut-être le sommet de l’iceberg car il y a de nombreuses adolescentes qui tombent enceintes mais qui se font illégalement avorter par la suite. » De plus, une grossesse en dessous de 18 ans comporte des risques et peut avoir de multiples conséquences. « C’est un gros problème social et économique pour le pays mais aussi un problème anatomique et psychologique pour la fille qui peut engendrer des contraintes financières pour les proches de la jeune fille, a-t-il ajouté. Nous devons tous mettre la main à la pâte pour trouver une solution à ce problème qui risque de prendre de l’ampleur de jour en jour. Nos grands-parents se mariaient à 13-14 ans, il y a 50 ans, et avaient plusieurs enfants, mais la grossesse avant l’âge de 18 ans ne peut être tolérée de nos jours avec la grande accessibilité à l’éducation. Mais je déplore le manque d’une bonne éducation sexuelle dans les écoles. Il y a beaucoup de réticences à ce niveau. »

Pour Monique Dinan, même si le pays a un grand besoin de bébés en raison du vieillissement de la population, il n’est pas question qu’ils naissent dans des familles instables. « De nombreux cas de grossesses précoces surviennent dans des familles séparées où les enfants ne sont pas bien encadrés. Ces cas surviennent particulièrement pendant la période des vacances scolaires quand les jeunes sont livrés à eux-mêmes. Il faut comprendre que dans un pays où nous avons besoin de plus d’enfants, il faut qu’ils naissent dans des familles stables. »

Méthodes de contraception

Il y a différentes méthodes de contraception à l’intention des adolescents quand il n’est pas possible de s’abstenir. Selon Dr Ramdaursingh, parmi les plus utilisés, on trouve le préservatif, la pilule contraceptive et la pilule du lendemain qui est en vogue actuellement. « Cependant, ces trois méthodes ne marchent que si on sait s’en servir. » Par exemple, si le préservatif n’est pas bien placé, l’extrémité peut éclater au moment de l’éjaculation. Il faut aussi savoir le retirer. Pour le gynécologue, cette méthode est recommandée pour éviter les infections sexuellement transmissibles (syphilis, gonorrhée, VIH). Le Dr Ramdaursingh estime que le stérilet n’est pas préconisé chez les adolescentes car elles n’ont pas encore fondé une famille. « Ce procédé peut être cause d’infertilité ou d’infection vaginale et utérine. » La méthode du calendrier ou méthode naturelle ne marche pas chez les adolescentes car leur cycle menstruel n’est pas régulier. « Cette méthode n’est pas fiable non plus. »

Pour Agniezka Kieniewicz-Duvergé, il faut tout simplement dire non à des relations sexuelles surtout avant l’âge de 16 ans et miser sur les valeurs afin de retarder cette initiation. Elle a aussi évoqué la méthode sympto-thermique qui est fiable à 90%, selon l’Organisation mondiale de la Santé.
Conséquences

Avoir des relations sexuelles alors qu’on n’est pas prêt physiquement et psychiquement peut avoir de lourdes conséquences selon les différents invités. Selon Dr Ramdaursingh, la jeune fille peut avoir des infections sexuellement transmissibles. Faute de connaissances également, elle ne sait pas quoi faire pour ne pas tomber enceinte et vit dans l’angoisse. Cela peut engendrer un débalancement hormonal en plus de troubles émotionnels.

Shirley Philippe a souligné : « L’adolescence est une période sensible et importante. Il faut se connaître soi-même de même que les changements physiologiques, psychiques et physiques et comprendre ce qui se passe dans son corps avant de passer à l’acte sexuel. » La MFPWA prend tous ces aspects en considération dans l’accompagnement des jeunes qui sollicitent leurs services.

« L’éducation sexuelle doit commencer à la maison »

L’éducation sexuelle doit commencer à la maison dès le plus jeune âge. C’est l’avis des quatre intervenants de l’émission, Allô docteur. Selon Agniezka Kieniewicz-Duvergé, les enfants apprennent beaucoup de l’attitude et du comportement de leurs parents, leur différence en tant qu’homme et femme mais aussi leur complémentarité. « Les parents devraient être les premiers éducateurs de leurs enfants et il faut renforcer leur capacité à parler de l’éducation sexuelle en famille, a-t-elle dit. C’est le cadre idéal pour passer tous les messages et les valeurs concernant la sexualité. »

Shirley Philippe a ajouté que les parents, et particulièrement la maman, ont un grand rôle à jouer en matière d’éducation à la sexualité. « Il faut répondre aux questions des enfants dans un langage approprié selon leur âge, car les Ong ne peuvent pas tout faire. »

D’après Monique Dinan, il y a trop de divorces à Maurice. « Il en résulte des enfants malades dans leur cœur et n’ayant pas un bon encadrement pour bien vivre leur sexualité, ils auront du mal à attendre avant de passer à l’acte», précise-t-elle. Moins de divorces équivalent à plus de familles stables et moins de problèmes dans la société. »

Agniezka Kieniewicz-Duvergé a souligné que parler de sexualité n’est pas un sujet tabou mais que les parents manquent de connaissances pour pouvoir aborder le sujet. Dr Ramdaursingh a, lui, estimé que les parents ont encore du mal à parler de sexualité et qu’ils doivent être formés pour pouvoir le faire convenablement. « Il faut savoir que ce n’est pas facile d’en parler dans tous les milieux sociaux. »

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