Mal utilisés, certains médicaments présentent des risques pour la santé
Quand ils prennent des médicaments, les Français sont nombreux à ne pas respecter les doses, à se faire conseiller par un proche plutôt qu’un professionnel ou à utiliser un produit périmé. Or, mal utilisé, un traitement peut s’avérer dangereux pour la santé.
Que sait-on du mésusage des médicaments par les Français ?
D’après une étude menée en 2021 pour l’Agence nationale du médicament (ANSM), trois Français sur dix adaptent, par eux-mêmes, la dose ou la durée des médicaments qui leur ont été prescrits.
Un Français sur cinq prend des doses plus fortes ou plusieurs médicaments en même temps pour soulager plus vite les symptômes.
Près d’un Français sur deux donne un médicament à un proche car il a des symptômes similaires, un sur dix le fait même systématiquement ou souvent.
Et 34% considèrent comme peu risqué de prendre un médicament périmé.
Quels sont les risques ?
Ne pas respecter les consignes peut réduire l’efficacité des médicaments, provoquer des effets indésirables, voire une aggravation de la maladie, souligne l’ANSM, qui lance mercredi une campagne sur leur bon usage. Un “enjeu de santé public majeur”, selon sa directrice générale, Christelle Ratignier-Carbonneil.
“Même le paracétamol peut être dangereux: en cas de surdosage, la personne risque sa vie”, a averti Catherine Simonin, administratrice à France Assos Santé, associée à la campagne.
“Il y a toujours une notion de bénéfice-risque, un médicament n’est jamais anodin”, insiste aussi Carine Wolf-Thal, présidente du conseil national de l’Ordre des pharmaciens.
Prescrits ou conseillés pour une personne, des médicaments peuvent se révéler inutiles ou nocifs pour une autre. Des anti-inflammatoires non stéroïdiens comme l’ibuprofène ou l’aspirine, qui figurent parmi les traitements les plus utilisés en automédication, sont par exemple interdits chez la femme enceinte. Après le 5e mois de grossesse, une seule prise peut entraîner le décès du futur bébé.
Une fois périmés ou mal conservés, les médicaments peuvent aussi perdre en efficacité ou être contaminés par des bactéries.
Quels sont les bons gestes à adopter ?
Dans sa campagne – “les médicaments ne sont pas des produits ordinaires, ne les prenons pas à la légère” – l’ANSM prône quatre réflexes à adopter.
Elle recommande de respecter la prescription ou le conseil du professionnel de santé (dose, fréquence, durée, etc.).
Elle incite à utiliser uniquement des médicaments prescrits ou conseillés par un soignant, et non par un de ses proches.
Elle préconise de ne pas prendre plusieurs médicaments en même temps sans l’avis d’un professionnel.
Elle invite enfin à faire attention aux modalités et à la durée de conservation des médicaments. Un médicament doit être rapporté en pharmacie lorsqu’il est périmé ou non utilisé. Il ne doit pas être jeté à la poubelle ou dans les toilettes.
Qu’en pensent les industriels ?
Pour l’industrie, une bonne utilisation des médicaments est un “élément indispensable pour optimiser leur valeur thérapeutique”, résume à l’AFP Eric Baseilhac, président de l’association du bon usage du médicament et directeur des affaires économiques et internationales du Leem (Fédération des entreprises du médicament).
Il assure que pour éviter d’engendrer des confusions et des mélanges, les industriels veillent à “rendre les médicaments très distinguables les uns des autres”.
Mais “il reste des progrès à faire en matière d’éducation thérapeutique”, concède-t-il.
Quelles pistes d’amélioration ?
“Demain, si on disposait de notices numériques, on pourrait très facilement, avec des QR codes, envoyer les patients visionner des petits films d’éducation thérapeutique pour un médicament un peu complexe à prendre”, suggère M. Baseilhac. Il cite l’exemple des traitements inhalés en cas de maladies chroniques des bronches, parfois utilisés par un public jeune et pas toujours très faciles à manipuler.
Le Leem travaille sur un projet de bon usage du médicament dans les cas d’angines, qui devrait voir le jour début 2024.
“On a imaginé un parcours de soin volontaire qui permettrait au patient d’aller voir directement son pharmacien en cas de mal de gorge. Il aura la possibilité de réaliser un test rapide pour déterminer si son origine est bactérienne ou virale”, explique M. Baseilhac.
“Cela permettra d’optimiser la prescription des antibiotiques à bon escient alors qu’aujourd’hui ils sont sur-prescrits”, ce qui, rappelle-t-il, est “catastrophique en termes d’antibiorésistance”.