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Dr Vimal Raj Nitish Gunness : « La neurochirurgie est un domaine en constante évolution, avec des innovations incroyables »

Le Dr Vimal Raj Nitish Gunness, neurochirurgien consultant basé en Arabie Saoudite et formé au Canada, en Europe et au Moyen-Orient, sera à Maurice du 8 au 16 août dans le cadre d’une collaboration avec C-Care Wellkin. Spécialisé en neurochirurgie complexe, il partage ici son parcours, son expertise et sa volonté de contribuer à la santé neurologique des Mauriciens.

Dr Vimal Raj Nitish Gunness est actuellement basé en Arabie Saoudite.

Pouvez-vous nous raconter votre parcours, de vos études en médecine jusqu’à votre spécialisation en neurochirurgie ?

J’ai fait mes études de médecine à Cluj-Napoca, en Roumanie, où j’ai obtenu une bourse d’État pour me spécialiser en neurochirurgie. J’étais passionné par la neuroanatomie, matière dans laquelle j’excellais, et j’ai été particulièrement inspiré par le mari de ma professeure, le Dr Szabo, lui-même neurochirurgien.

J’ai commencé mon internat en Roumanie, mais les perspectives d’avenir y étaient limitées. Parallèlement, je devais aussi soutenir financièrement ma famille, notamment pour les études de ma sœur en Angleterre. J’ai donc postulé dans plusieurs pays européens, mais ne possédant pas la citoyenneté européenne, cela s’est avéré compliqué. C’est finalement au Luxembourg que j’ai pu poursuivre mon internat, avant de passer mes examens de spécialiste en Allemagne.

Qu’est-ce qui vous a motivé à vous spécialiser dans la neurochirurgie, et particulièrement dans les domaines de la neuro-oncologie, de la cerebrovasculaire et de la chirurgie de la base du crâne ?

Dès mon plus jeune âge, j’ai été fasciné par la profondeur et les mystères de l’esprit humain. Mon père, adepte du bouddhisme, m’a très tôt initié à la sérénité que procure la méditation, éveillant en moi une curiosité profonde pour le fonctionnement du cerveau.

Cette fascination s’est amplifiée lors de l’étude de la neuroanatomie, dont la complexité et la finesse m’ont profondément marqué. Chaque fibre, chaque connexion semblait révéler la subtilité de la vie. Comprendre les mécanismes de la pensée, de la conscience, et surtout la capacité du cerveau à se réorganiser — cette neuroplasticité extraordinaire — a été pour moi une véritable révélation.

J’ai alors compris que la complexité de la neurochirurgie n’était pas un fardeau, mais une opportunité unique : celle d’intervenir au cœur du sanctuaire qu’est le cerveau, pour tenter de restaurer équilibre et fonction. C’est cette passion, cette quête de sens et ce désir d’aider au plus profond de l’humain qui m’ont naturellement guidé vers cette spécialité.

Vous avez également suivi un programme en leadership à la Harvard Business School et en Global Health Education initiative de l’université de Toronto. Pourquoi était-ce important pour vous d’acquérir des compétences en leadership dans votre pratique médicale ?

J’ai toujours considéré que la médecine, et en particulier la neurochirurgie, ne se limite pas à la technique opératoire. Diriger une équipe, prendre des décisions en situation critique, et communiquer efficacement avec les patients, leurs familles et les collègues sont des compétences tout aussi essentielles.

En neurochirurgie, les enjeux humains, éthiques et médicaux sont étroitement liés. Le leadership permet de garder une vision claire, de mobiliser une équipe autour d’objectifs communs, et d’assurer la meilleure prise en charge possible.

Le programme à la Harvard Business School m’a apporté des outils précieux pour gérer le stress, améliorer la communication, la gestion des conflits et la prise de décision stratégique. Il m’a aussi ouvert à la gestion des institutions de santé et à l’innovation.

Quant à la Global Health Education Initiative de l’Université de Toronto, elle m’a donné une perspective globale sur les systèmes de santé et les défis mondiaux. Même dans une pratique locale, comprendre les déterminants sociaux, les inégalités d’accès et les différents contextes de soins est crucial, car ces facteurs influencent directement la santé des patients et les ressources disponibles.

La neurochirurgie n’est pas seulement l’acte opératoire selon lui, c’est aussi aider la personne à retrouver son autonomie et sa dignité.

Pour nos lecteurs, pouvez-vous expliquer concrètement en quoi consiste la neurochirurgie et quelles pathologies elle traite ?

La neurochirurgie est la spécialité médicale qui s’occupe du diagnostic et du traitement chirurgical des maladies qui touchent le cerveau, la moelle épinière, les nerfs périphériques et la colonne vertébrale. C’est une discipline à la fois très technique et très exigeante, car elle concerne des structures essentielles à la vie et au fonctionnement quotidien.

Concrètement, la neurochirurgie traite de nombreuses pathologies, telles que :

  • Les tumeurs cérébrales (bénignes ou malignes)
  • Les anévrismes et autres malformations vasculaires du cerveau
  • Les traumatismes crâniens ou rachidiens (fractures, hématomes)
  • Les hernies discales ou autres pathologies dégénératives de la colonne vertébrale
  • L’hydrocéphalie (accumulation de liquide dans le cerveau)
  • L’épilepsie chirurgicale dans certains cas
  • Les douleurs chroniques liées aux nerfs ou à la colonne
  • Les maladies de la base du crâne, comme les neurinomes de l’acoustique
  • La neurochirurgie fonctionnelle, qui traite certaines pathologies comme la maladie de Parkinson, les tremblements, la dystonie ou les douleurs chroniques rebelles, grâce à des techniques telles que la stimulation cérébrale profonde (Deep Brain Stimulation)

La neurochirurgie, c’est aussi accompagner les patients avant et après l’opération, car le chemin vers la guérison implique souvent de la rééducation et un suivi attentif. C’est un domaine où chaque geste compte, et où la précision et la connaissance de l’anatomie sont primordiales.

Quels sont aujourd’hui les plus grands défis dans le domaine de la neurochirurgie ?

La neurochirurgie a beaucoup évolué grâce aux avancées technologiques et scientifiques, mais elle fait encore face à de nombreux défis.

L’un des plus grands défis, c’est l’inégalité d’accès aux soins dans le monde. En Afrique subsaharienne, par exemple, il y a en moyenne moins d’un neurochirurgien pour un million d’habitants, ce qui est la plus faible densité au monde. Pour comparaison, en Europe ou en Amérique du Nord, on compte souvent de 10 à 20 neurochirurgiens pour un million d’habitants. Cela crée d’énormes écarts dans la prise en charge des maladies neurologiques.

Je reçois moi-même des patients qui me sont référés depuis des pays comme Madagascar, où le manque de spécialistes et d’infrastructures complique énormément la prise en charge. Parfois, c’est très difficile de savoir quoi dire à mes collègues dans ces pays, car même si nous avons la volonté d’aider, les moyens techniques ou matériels sur place ne suivent pas toujours.

Un autre défi majeur est de réduire les risques des interventions, car le cerveau, la moelle épinière et les nerfs sont des structures extrêmement sensibles. Même avec des techniques modernes, chaque millimètre compte.

Il y a aussi le défi de mieux soigner des pathologies très agressives, comme certaines tumeurs cérébrales malignes, où malgré les progrès, les chances de guérison restent parfois limitées. La recherche et l’innovation sont donc cruciales.

Enfin, il ne faut pas oublier l’importance de l’accompagnement du patient après l’opération. La rééducation, le soutien psychologique, la qualité de vie… tout cela fait partie intégrante de notre métier.

La neurochirurgie, ce n’est pas seulement l’acte opératoire : c’est aussi aider la personne à retrouver son autonomie et sa dignité. C’est un domaine exigeant, mais passionnant, où l’on apprend chaque jour.

Vous serez bientôt à Maurice pour une collaboration avec la clinique C-Care Wellkin. Parlez-nous de cette volonté de rapprocher l’expertise neurochirurgicale à la population mauricienne.

L’objectif principal de cette initiative est double et vise avant tout à servir la communauté mauricienne :

  1. Rendre la neurochirurgie accessible et démystifier la spécialité

Le cerveau et la colonne vertébrale sont des parties essentielles et complexes de notre corps, et les problèmes qui les affectent peuvent être très angoissants. Il y a quelques années, en 2017, j’ai eu l’occasion de participer à une interview radio ici à Maurice. Ce fut une expérience très révélatrice : le nombre d’appels et de questions de la part des auditeurs était impressionnant. Beaucoup de personnes se posaient des questions sur des problèmes neurochirurgicaux qui pouvaient être traités, mais elles n’en avaient pas conscience, ou elles pensaient qu’un manque de traitement spécialisé à Maurice rendait ces solutions inaccessibles.

  1. Partager l’expertise et sensibiliser aux dernières avancées

– La neurochirurgie est un domaine en constante évolution, avec des innovations incroyables (chirurgie mini-invasive, neuronavigation, microscopes « intelligents », neuromodulation, etc.). C’est l’occasion d’expliquer au public mauricien comment ces avancées peuvent améliorer concrètement la prise en charge des maladies neurologiques et vertébrales.

– Mon rôle sera de fournir des informations claires et compréhensibles sur les conditions traitées, les possibilités d’intervention et les technologies de pointe utilisées. Il s’agit aussi de rassurer et d’offrir une lueur d’espoir pour ceux qui souffrent, en leur montrant que des solutions existent et qu’elles sont de plus en plus accessibles.

Le Dr Gunness entouré de deux figures majeures de la neurochirurgie cérébrovasculaire : à gauche, le Prof. Spetzler, pionnier mondial du domaine, et à droite, le Prof. Bojanowski, son mentor au Centre Hospitalier de l’Université de Montréal.

Vous serez à la clinique C Care Wellkin du 8 au 16 août, quels types de patients pourront bénéficier de ces consultations ?

Ces consultations s’adressent aux personnes qui ont des soucis de santé liés au cerveau ou à la colonne vertébrale. On veut aider un maximum de monde, alors voici qui devrait particulièrement en profiter :

  • Si vous avez des douleurs qui ne partent pas : Vous souffrez du dos ou du cou depuis longtemps ? Vous avez des sciatiques (douleurs dans la jambe) ou des douleurs qui descendent dans les bras ou les jambes ? Une consultation peut vous aider à comprendre d’où vient le problème et quelles solutions existent.
  • Si vous avez des symptômes « bizarres » : Des maux de tête très forts ou très fréquents, des vertiges, des fourmillements ou des engourdissements dans les membres, une faiblesse subite, des difficultés à marcher ou à garder l’équilibre, ou des changements de vision. Tous ces signes peuvent indiquer un souci au niveau neurologique et méritent d’être vérifiés.
  • Si vous avez déjà un diagnostic et que vous voulez un second avis : On vous a dit que vous aviez une hernie discale, un rétrécissement du canal rachidien (sténose spinale), une tumeur au cerveau (même si elle est bénigne), ou des tremblements ? Venez discuter. C’est l’occasion d’avoir un autre regard sur votre situation et de connaître les toutes dernières options de traitement.
  • Si la maladie de Parkinson ou des tremblements vous affectent : Si vous ou un proche souffrez de la maladie de Parkinson ou de tremblements essentiels, nous pouvons évaluer si des traitements avancés comme la neuromodulation (le pacemaker du cerveau) pourraient vous aider à retrouver une meilleure qualité de vie.
  • Si vous avez des questions sur un enfant : Les problèmes neurologiques peuvent parfois toucher les enfants. Si un enfant a des malformations, des retards de développement liés au système nerveux, ou d’autres symptômes qui vous inquiètent, n’hésitez pas à venir chercher un avis spécialisé.

Vous exercez actuellement en Arabie Saoudite, mais restez connecté à Maurice. Qu’est-ce qui vous pousse à revenir pour contribuer au système de santé mauricien ?

C’est une excellente question, et ma réponse est profondément ancrée dans ma conviction personnelle et mon parcours de vie. Bien que j’exerce actuellement en Arabie Saoudite, mon lien avec Maurice n’a jamais été rompu. Il y a plusieurs raisons puissantes qui me poussent à revenir et à m’engager auprès du système de santé mauricien :

  1. Une vocation, pas une quête de richesse, mais un désir d’aider. Laissez-moi être très clair : je n’ai pas choisi la neurochirurgie pour devenir riche. C’est une vocation, une voie que j’ai embrassée avant tout pour aider les gens, pour sauver des vies et pour améliorer la qualité de vie.

Ma motivation est humaine avant d’être financière. Il est déchirant de savoir que de nombreuses personnes à Maurice, encore aujourd’hui, décèdent ou se retrouvent avec des handicaps neurologiques lourds simplement parce que les soins adéquats ou les infrastructures nécessaires ne sont pas disponibles localement au moment crucial.

  1. Un appel du cœur et une connexion historique, marquée par des expériences personnelles. Ce constat n’est pas seulement théorique pour moi. L’île Maurice a toujours eu une place particulière dans mon cœur, et l’expérience de la réalité du terrain mauricien a renforcé ma détermination. Je me souviens très bien de mon passage en 2017, où une interview radio avait généré un nombre incroyable d’appels. Les auditeurs mauriciens posaient des questions poignantes sur des problèmes neurologiques et neurochirurgicaux, souvent sans savoir qu’il existait des traitements ou regrettant le manque d’accès à des soins spécialisés sur l’île.

Cette expérience m’a profondément marqué et a allumé en moi une étincelle : celle d’une nécessité d’apporter mon aide. De plus, j’ai eu personnellement des proches, comme ma grand-mère, et j’ai connaissance de bien d’autres Mauriciens, qui auraient pu être sauvés ou éviter des séquelles si nous avions eu accès à des soins et des infrastructures de pointe ici à Maurice.

Ce ne sont pas des cas isolés ; c’est une réalité que je souhaite contribuer à changer. Ce n’est pas juste un « retour », c’est une reconnexion avec une population et une terre qui m’interpellent par leurs besoins et mes propres expériences.

  1. Partager les avancées et combler un besoin. La neurochirurgie évolue à une vitesse fulgurante. Les techniques mini-invasives, la neuronavigation, les microscopes avec lumières fluorescentes pour mieux voir les tumeurs (comme le glioblastome), l’exoscope qui permet d’opérer sur grand écran, l’IRM intraopératoire pour une précision maximale en direct, ou encore la neuromodulation – toutes ces innovations changent la donne. Je vois qu’à Maurice, il y a une soif de ces expertises et un besoin pour ces traitements de pointe qui ne sont pas toujours disponibles. Mon engagement est de partager ce savoir-faire et ces techniques pour que les Mauriciens puissent eux aussi bénéficier des meilleurs soins possibles, sans avoir à voyager loin de chez eux.
  2. Une contribution ciblée, sans prétention de changer le système entier. Il est important de souligner que je ne suis pas ici pour changer le système de santé mauricien à moi seul, car je sais qu’une seule personne ne le peut pas. Mon rôle est d’apporter une contribution ciblée et spécialisée. Je souhaite mettre mon expertise et mon expérience au service des patients qui en ont besoin, en complément des soins existants. C’est une démarche d’assistance et de collaboration, axée sur l’amélioration concrète de la prise en charge individuelle.

Le médecin en deux mots

Le Dr Vimal Raj Nitish Gunness est un neurochirurgien consultant dont le parcours illustre une formation d’élite et une expérience internationale dans plusieurs sous-spécialités de la neurochirurgie.

Titulaire du diplôme de docteur en médecine (MD) et membre du European Board of Neurological Surgery (FEBNS), il est également certifié en soins d’urgence avancés, notamment en Advanced Trauma Life Support (ATLS) et en Basic Life Support (BLS).

Spécialisations et formations avancées

Le Dr Gunness a complété plusieurs fellowships à l’étranger :

  • Chirurgie neurovasculaire et de la base du crâne – Centre Hospitalier de l’Université de Montréal, Canada
  • Neuro-oncologie – St. Michael’s Hospital, Université de Toronto, Canada
  • Chirurgie de la colonne vertébrale – Mater Hospital, University College Dublin, Irlande

En plus de son expertise clinique, il s’est aussi formé au Global Health Education Initiative (GHEI) de l’Université de Toronto, et a suivi un programme en Leadership Principles à la Harvard Business School, renforçant ainsi ses compétences en gestion et en leadership médical.

Affiliations académiques et cliniques

Le Dr Gunness exerce et collabore avec des institutions médicales et de recherche renommées :

  • King Abdullah International Medical Research Center, Jeddah, Arabie Saoudite
  • College of Medicine, King Saud bin Abdulaziz University for Health Sciences, Jeddah, Arabie Saoudite

 

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