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Transplantation d’organes : pour un meilleur cadre juridique

Le Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant) Bill a été présenté en première lecture, à l’Assemblée nationale, le mardi 24 avril 2018. Les débats y relatifs se poursuivront ce mardi 8 mai. Ce texte de loi abrogera la Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant) (Amendment) Act de 2013.

Présentée par le ministre de la Santé, le Dr Anwar Husnoo, cette nouvelle loi vise à offrir un meilleur cadre juridique pour le prélèvement, la préservation et la transplantation des organes et tissus humains, autre que le sang, sous supervision médicale appropriée. Elle abrogera l’ancienne législation régissant le don d’organes à Maurice. Si cette loi est promulguée, il sera désormais possible de faire don d’organes aux personnes autres que des membres de la famille.

Ainsi, si une personne veut faire un don d’organes, elle devra au préalable avoir le feu vert du Tissue Donation, Removal and Transplant Board. Les dispositions de la nouvelle loi stipulent aussi que seul un spécialiste dans le domaine de la transplantation aura le droit de pratiquer l’intervention chirurgicale. Dans la foulée, plusieurs critères seront établis avant de faire une greffe d’organes.

Desormais, c’est le Tissue Donation, Removal and Transplant Board qui s’occupera de tous les cas de don, de prélèvement et de greffe à Maurice. Ce board, qui verra le jour une fois la loi votée, sera composé du directeur général des services de santé. Il agira comme le président de ce Conseil. Un représentant du bureau de l’Attorney General, un maximum de trois spécialistes, dont un consultant médical et aussi un maximum de trois représentants de la société civile feront également partie du board.

Ils seront nommés par le ministère de la Santé qui déterminera les modalités et les conditions y relatives. Par ailleurs, un spécialiste dans le domaine pourrait être appelé à fournir son avis sur un cas de prélèvement ou de greffe dans la mesure où les membres du board n’auraient pas l’expérience requise ou le savoir nécessaire pour le faire.

Fonctionnement du board

Il est bon de souligner que les membres du board seront en poste pour une période de deux ans mais leurs contrats peuvent être renouvelés. Sur approbation du ministre de la Santé, le board déterminera également l’allocation que percevront les membres. Par ailleurs, un sous-comité peut être désigné pour aider le Conseil dans l’exercice de ses fonctions.

Des personnes qualifiées pourront être appelées à faire partie de ce sous-comité mais elles n’auront aucun droit de vote sur les questions relatives aux décisions du board.

En ce qui concerne le fonctionnement du Tissue Donation, Removal and Transplant Board, celui-ci aura pour principale tâche d’étudier les requêtes pour les dons d’organes. Le Board aura le droit d’accepter ou de refuser une demande.

Dans le cas où un donneur n’aura pas indiqué l’identité du receveur, le Conseil décidera qui en sera le bénéficiaire selon l’ordre de priorité sur la liste d’attente des patients et aussi en se basant sur l’aspect de compatibilité. Le Board veillera aussi à ce que chaque exercice de prélèvement, préservation et transplantation se fera dans une institution de santé reconnue (hôpital, clinique, laboratoire, centre de santé).

Qui peut faire un don d’organes ?

Toute personne majeure peut faire une requête auprès du Board pour un don d’organes. Sa demande doit être soutenue par un certificat émis par deux spécialistes pour indiquer que le prélèvement de l’organe – régénérable ou non-régénérable – ne mettra pas la santé du donneur en danger.

Dans le cas du don d’un organe non-régénérable, la requête devra être soutenue par un certificat émis par un spécialiste qui compte au moins 5 années d’expérience dans le domaine de la chirurgie de transplantation, expliquant les effets de ce prélèvement.

Cette nouvelle loi fait aussi provision pour le don d’organes par les mineurs. Plusieurs critères seront établis et des procédures seront respectées. Aucune personne n’aura le droit de faire une requête auprès du Board pour un don d’organe par un mineur. Mais la requête peut être considérée si :

(a) le don d’un organe régénérable – un certificat émis par deux spécialistes sera alors nécessaire ;

(b) un cas où il n’existe aucun donneur adulte ;

(c) le don de l’organe peut sauver la vie du receveur. Une personne (ou plus), qui exerce une autorité parentale sur le mineur, peut également demander l’autorisation du Tissue Donation, Removal and Transplant Board pour le don d’un organe régénérable par le donneur mineur. Plusieurs autres points sont stipulés concernant le don d’organes par un mineur.

Ce que dit la loi dans les cas des personnes décédées

Depuis que le Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant) Bill a été présenté au Parlement, plusieurs voix se sont élevées contre certains articles de la loi. L’article 11 qui concerne le don d’organes par une personne décédée a suscité pas mal de débats au cours de ces deux dernières semaines. La nouvelle loi stipule qu’une personne peut faire une demande auprès du Board pour un don d’organes qui prendra effet après sa mort.

Si une personne n’aura pas signifié son intention de faire un don d’organes après sa mort, le Board peut demander à ses proches de faire une requête pour le don de n’importe quel tissu du corps du défunt. Par ailleurs, si un donneur n’a pas indiqué l’identité du receveur ou n’a pas avancé les raisons de faire don de ses organes après sa mort, c’est le Board qui décidera qui pourra les recevoir.

La clause de la discorde concerne le prélèvement d’organes d’une personne décédée sans que celle-ci n’ait signifié son intention d’en faire don de son vivant. En effet, la loi prévoit que dans le cas où une personne, autre qu’un mineur, meurt et qu’elle n’a fait aucune requête auprès du Board pour un don d’organes ou a signifié son intention d’en faire autant de son vivant, le Board  la considérera comme donneur.

Dr Rajiv Upadhyaya, spécialiste de greffe d’organes : « Il y a une grande demande pour la transplantation à Maurice »

Dr Rajiv Upadhyaya

Le Dr Rajiv Upadhyaya est spécialiste de la chirurgie de transplantation rénale. Il a fait plus de 300 interventions au cours de sa carrière. Il estime que le Human Tissue (Removal, Preservation and Transplant) Bill doit être voté au plus vite. Car à Maurice, il y a une grande demande pour la chirurgie de transplantation.

Quelle est l’importance pour Maurice de venir de l’avant avec un tel projet de loi ?
À Maurice, on ne pratique plus des chirurgies de transplantation. Il y avait des greffes rénales auparavant mais uniquement si l’organe provenait d’un donneur vivant qui avait des liens de parenté avec le receveur. Par exemple, un don d’organes devait se faire uniquement entre parents, frères, sœurs, tantes ou oncles. Le projet de loi pour le prélèvement des organes d’un cadavre a été présenté en 2006 mais pour des raisons que l’on ignore, cette loi n’a jamais vu le jour jusqu’à présent. On a perdu beaucoup de temps à revoir différentes sections de la loi. Mais je pense qu’il est temps que cette loi soit votée et promulguée. Si le gouvernement décide d’y apporter des amendements, il peut le faire après. C’est un bon projet de loi, mais il faut l’implémenter.

Y-a-t-il une grande demande dans le domaine de la chirurgie de transplantation ?
Nous comptons en ce moment plus d’un millier de patients sous traitement de dialyse. Environ 40% d’entre eux sont éligibles pour une greffe rénale à tout moment s’ils ont un donneur. Il y a aussi plus de 120 nouveaux cas de patients qui souffrent d’insuffisance rénale. Les principales causes de cette maladie sont le diabète, l’hypertension et la maladie des reins elle-même. Il y a certainement une grande demande pour la chirurgie de transplantation à Maurice.

Quels sont les organes qui sont les plus concernés ?
L’organe le plus concerné par la chirurgie de transplantation demeure le rein. La transplantation du foie, du cœur et de la cornée devient aussi très fréquente. On pratique la chirurgie de la cornée à l’hôpital de Moka mais il n’existe pas de transplantation du foie et du cœur à Maurice. J’aurais souhaité qu’un département spécialisé dans la chirurgie de transplantation voie le jour à Maurice.

Y-a-t-il des risques lors de ces interventions chirurgicales ?
Il y a des risques en cas de non-compatibilité. Mais il faut faire des examens de comptibilité au préalable. En premier lieu, il faut que le donneur et le receveur soient du même groupe sanguin. Puis il faut faire un test d’antigènes, connu comme Human Leucocyte Antigen (HLA). Le cross match est tout aussi important. C’est une étude de compatibilité réalisée systématiquement pour prévenir le phénomène de rejet de greffe.

Une personne souffrant d’une quelconque maladie peut-elle faire un don d’organes ?
Cela va dépendre de la nature de cette maladie. Par exemple, si une personne souffre d’une simple grippe, il n’y a aucun problème pour qu’il fasse un don d’organes. Néanmoins, une personne souffrant de diabète et de l’hypertension ne peut faire un don d’organe. Cela en raison d’un fort risque d’insuffisance rénale chez le donneur.

Pendant combien de temps peut-on préserver un organe prélevé avant la greffe ?
À Maurice, cela ne se fait pas mais dans le cas d’un prélèvement d’organe d’un cadavre, il faut préserver les tissus prélevés dans une solution spéciale. En ce qui concerne la greffe rénale, il est recommandé de pratiquer la chirurgie dans un délai de 48 heures après le prélèvement. On peut également le faire dans un délai de 72 heures mais c’est fortement déconseillé. La greffe du foie doit se faire immédiatement après le prélèvement alors que pour le cœur, la chirurgie doit se faire dans un délai de 4 heures seulement.

En moyenne, quel est le coût pour une chirurgie de transplantation ?
Une chirurgie de transplantation ne doit pas coûter plus de Rs 300,000.

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